Depenses pour l’education au Pakistan-precision

Un article paru dans la Croix nous dit : “Le Pakistan consacre 1,8 % de son budget national à l’éducation.” L’article de ce journal est “tiré” (pour rester poli) d’un reportage de RFI du 25 mars 2011REP-INTER_-25_03-_PAKISTAN_Education, qui reprend les conclusions d’un rapport rédigé par des parlementaires pakistanais et des représentants de la société civile. Ce chiffre n’est ni exact, ni réaliste. Il s’agit sans doute des dépenses d’éducation par rapport au revenu intérieur brut (ou GDP) et non par rapport au budget de l’Etat. Le Pakistan dépense en fait 11,2% de son budget national pour l’éducation en 2008 ou 2,9% du de son revenu intérieur brut, selon l’Unesco. Voir les données UNESCO sur l’éducation du Pakistan ou consultez la fiche wikipédia.

L’enseignement primaire est constitué de deux cycles de quatre années chacun, tandis que la plupart des pays du monde (comme l’Inde) ont maintenant adopté un seul cycle de 5 à 6 ans. Il n’est donc pas possible de comparer les dépenses affectées à chaque élève du primaire avec ceux des autres pays, très pratique ! De plus, à l’instar de l’Inde, les dépenses d’éducation sont souvent gérées au niveau des provinces et régions, ce qui complique les calculs. Le parlement vient d’ailleurs de s’opposer à un prêt de la Banque Mondiale destiné à l’enseignement supérieur, avec en toile de fond le problème de la définition des compétences entre gouvernement fédéral et provinces. Voir l’article.

Le FMI semble avoir toutes les peines du monde à faire orienter les dépenses vers les secteurs sociaux et ce mémo nous dit tout simplement que lors négociations : “Les dépenses militaires ne font pas partie des discussions”,tout en rassurant sur l’évolution à moyen terme du programme qui permettra “l’espace fiscal nécessaire à de plus grandes dépenses sur la santé, l’éducation et les infrastructures”.

Vous pouvez lire ici une transcription des négociations entre le fonds et les autorités pakistanaises, datée de 2008. Là encore, la question des dépenses militaires est posée mais n’a pas de réponse. “Defense spending is basically an item that was determined by the government and included in the budget projections for this fiscal year. There was no discussion of this topic. MS. KAMATA: Thank you very much for joining this conference call.” Merci, point barre ! Néanmoins, le site du FMI dispose de statistiques sur les dépenses du gouvernement central par secteur.Accès ici.

Le graphique ci-dessous tiré de données de la Banque Mondiale reprise par Perspective Monde de l’U. de Sherbrookenous montrent que les dépenses militaires semblent en baisse et rejoignent les dépenses d’éducation, qui sont en hausse, lorsqu’on les rapporte au PIB par habitant (3,2%).

Cela semble particulièrement curieux compte tenu de la situation qui prévaut en Afghanistan.Il faudrait pouvoir regarder dans le détail les modes de calcul et les éventuels changements de méthode de comptage dans le temps.

Quoi qu’il en soit, le gouvernement fédéral du Pakistan dépense plus pour sa défense que pour l’éducation, qui bénéfice d’un fort appui du secteur privé. Cet article, daté de 2002, pose la question de savoir si l’enseignement privé, en forte progression, ne bénéfice qu’aux élites urbaines ou soutient la scolarisation des pauvres ruraux.

Le système éducatif du Pakistan a été particulièrement affecté par les récentes inondations qui empêchent 521 371 enfants d’aller à l’école. Quelle merveille de précision de la part de l‘Unesco ! “Selon les chiffres d’un examen récent des objectifs du Millénaire pour le développement effectué par des agences des Nations Unies au Pakistan, les inondations empêchent 521 731 enfants pakistanais d’aller à l’école. Ce chiffre représente près de 6 % des élèves du primaire.”

Les défis “structurels” du système éducatif pakistanais sont bien décrits dans ces documents de la Banque Mondiale ou dans cet article de 2007 qui aborde les questions d’explosion démographique. “From the tabular data it can easily be concluded that government is not able to invest the requisite amount on education in accordance with the population growth. Allocations lag behind the developing countries in the region.”

Relayez les informations émanants de la société civile est une bonne chose mais la distordre n’est pas lui rendre service. On souhaite bien du courage aux pakistanais.

Ce post est dédié à Maître Capello, présentateur télé des années 70-80, icône de l’éducation populaire, célèbre pour son culte de la précision et ses jeux de mots. Chaque année, il allait faire passer les épreuves du baccalauréat aux détenus de la prison de Fresnes.

Pierre Varly

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