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Photo par Conor Ashleigh

Les différents types de handicap et adaptations dans la mesure des acquis scolaires

Photo par Conor Ashleigh

Par Alain Mante, avec l’aide de Ben Wandivinit

Dans cette série rédigée par Alain Mante et consacrée au handicap, nous sommes introduits à son historique, les types de handicaps tels qu’ils sont compris à l’échelle mondiale et nationale (France), et une analyse de sa situation actuelle en France.

Les différents types de handicap et adaptations dans la mesure des acquis scolaires

1. Introduction

Plus d’un milliard de personnes dans le monde vivent avec un handicap sous une forme ou une autre et près de 200 millions d’entre elles ont de très grandes difficultés fonctionnelles[1], (mais nous avons toujours de grosses difficultés à obtenir des statistiques exactes pour difficultés de recensement organisé, ou dissimulation de la situation de handicap).

Bien souvent, ces personnes voient leurs besoins spécifiques réduits au constat d’une déficience anatomique. Ainsi leur condition est réduite à un simple manque ou à une lésion, ce qui réduit la complexité de leur situation.

Affectant possiblement une quelconque partie du corps, cette déficience peut occasionner des interventions, des suivis médicaux, et des assistances d’ordre extrêmement divers.

1.1 La classification internationale

Le rapport mondial sur le handicap (2012)

La Classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé ou CIF (OMS, 2001), fournit un langage et un cadre normalisés pour mieux décrire et organiser les informations sur le fonctionnement et le handicap. La CIF, vision plus récente, ne classifie pas les individus. Elle catégorise le fonctionnement des individus. Non seulement les déficiences, mais aussi les limitations d’activité, les restrictions de participation, les obstacles ou les facilitateurs environnementaux. Par conséquent, elle comprend le handicap comme une description de la situation d’une personne (par rapport à son environnement) plutôt que comme une caractéristique de la personne.

UNICEF, dans son livret technique sur la définition et classification du handicap fait également référence à la CIF et à son importance dans la programmation des initiatives d’éducation inclusive.

Mais, si le manuel promeut la conceptualisation adoptée par la CIF, il souligne néanmoins que le conception de l’apprentissage universel exige la prise en compte de toute déficience sensorielle, intellectuelle ou physique afin de mettre en place des mesures d’apprentissage adéquates et individualisées.

Interactions entre les composantes de la CIF

1.2 Débarrassons-nous de l’étiquetage

L’adoption de ces deux conceptualisations signifie qu’il est nécessaire de s’éloigner de l’étiquetage traditionnel des handicaps. Les enseignants qui sont encouragés et à qui l’on apprend à mettre un élève trisomique dans une boîte avec tous les autres élèves trisomiques ne se rendront pas compte que chacun d’entre eux a des besoins individuels qui, s’ils sont pris en compte de manière adéquate, rendent l’apprentissage possible pour chacun d’entre eux. Comme nous le verrons dans la section ci-dessous consacrée à la classification française, cet étiquetage traditionnel est encore bien vivant dans certains contextes, et continue, par conséquent, à défavoriser l’éducation inclusive.

1.3 La classification française

La catégorisation française, comme indiqué ci-dessus, offre une vue d’ensemble des handicaps qui décrit les formes les plus connues et les plus visibles. Elle manque de nuance et s’inscrit encore dans l’étiquetage traditionnel dont l’OMS veut se passer :

  • les déficiences motrices, et les déficiences sensorielles visuelles,
  • puis, fréquemment indécelables au premier regard :
    • les déficiences sensorielles auditives, les déficiences intellectuelles, les déficiences psychiques ;
    • les déficiences de la parole et du langage (écrit et parlé) ainsi que l’ensemble des troubles de l’apprentissage, (déficits de l’attention (TDAH), troubles dys, etc.), plus récemment cernés sous les appellations de troubles neurodéveloppementaux[1];
    • et enfin, les combinaisons de handicaps (dont polyhandicap, pluri handicap, sur handicap) et les maladies invalidantes.

Cette classification est hétérogène en proportions en France comme dans le monde.

Distribution de personnes en handicap en France

1.4 Le handicap – englobant la personnalité ?

Comme déjà brièvement abordé plus tôt, cette approche schématique par type de déficience comporte les limites des catégories grossières. Elle range des personnes par classe de manque, de diminution organique, motrice, sensorielle, ou mentale. Ceci les différencie des autres en pleine possession de leurs moyens, de leurs facultés.

On perçoit, on définit, on étiquette la personne de son handicap. On tend à englober sa personnalité dans son handicap. Il s’agit d’une perception générale du commun des mortels dont il est souhaitable de se défaire : la représentation superficielle de l’autre par un détail physique, comme par exemple le blond, la brune aux yeux bleus, mais aussi, le boiteux, le sourd, le fou, etc.

1.5 Un filtre : n’être vu qu’au travers de son handicap, et l’estime de soi mise à mal

Ces représentations n’abordent simplement pas leur personnalité, leur ressenti d’une telle situation, ni l’impact, l’atteinte de leur estime de soi. Estime de soi dont ils souffrent journellement par le regard des gens ordinaires, et par ce qu’ils ne peuvent pas accomplir comme eux (jusqu’à la culpabilité de ne pas être comme tout le monde).[1]

Stephen Hawking, peut-être l’un des pionniers scientifiques les plus célèbres de l’histoire récente, a été mondialement reconnu pour ses avancées scientifiques en astrophysique. Il a également été atteint de la maladie de Lou Gehrig.

Enfin, elle ne prend pas toujours en compte les autres capacités effectives de la personne, le potentiel intellectuel entre autres, ni ses compétences parfois exceptionnelles. Comme si la déficience d’un organe, d’une fonction était généralisée à l’ensemble de l’individu.

Les regards furtifs des autres, leur indifférence et leurs plaisanteries déplacées, ainsi que leur compassion forcée ne font qu’aggraver l’image qu’ils ont d’eux-mêmes. Une représentation de soi ou une estime de soi déjà mise à mal par leurs difficultés à gérer leur propre quotidien.

Il est d’autant plus important de faire quelque chose contre cette exclusion qu’ils ressentent et qui leur est imposée. L’école est l’un des nombreux endroits où une plus grande inclusion est nécessaire, et où un important sentiment d’appartenance devrait être inculqué dès le départ.

2. Tentatives d’inclusion dans les évaluations scolaires à grande échelle en France

2.1 Universal Design of Assessments

Dans l’éducation, l’un des nombreux domaines dans lesquels des efforts d’inclusion doivent être faits est celui des évaluations des acquis scolaires.[1] Les principes en la matière s’inspirent de plus en plus par ce que l’on appelle communément la conception universelle des évaluations (ou Universal Design of Assessments). Ces types d’évaluation sont conçus et développés pour permettre la participation du plus grand nombre possible d’élèves, de manière à obtenir des tests valables pour tous.

2.2 Étude de cas – France

Dans ce contexte, le Ministère de l’Education Nationale, de la Jeunesse et des Sports a tenté d’affiner ses évaluations à grande échelle afin de progresser vers une éducation plus inclusive. Au cours d’un webinaire organisé et partagé par la communauté d’évaluation électronique FLIP+[1], ils ont partagé des idées importantes sur la révision de leurs pratiques d’évaluation dans le but d’une inclusion complète des plus de 430,000 élèves en situation de handicap (voir graphique ci-dessous).

Nombre d’élèves en situation de handicap à la rentrée 2022

2.2.1 Facteurs et principes directeurs

Ceci dit, l’un des facteurs clés a été de travailler sur l’accessibilité globale de ces évaluations, en veillant à ce que le nombre d’élèves en mesure de participer pleinement aux évaluations soit exhaustif. Cela a impliqué, entre autres, d’offrir aux étudiants la possibilité de compléter les tests numériquement ou sur papier, de revoir les questions posées dans ces évaluations et de réfléchir à la possibilité pour chaque individu d’y répondre (exemple simplifié fourni ci-dessous).

 2.2.2 Une approche à deux volets de la mise en œuvre

Ces changements ont été réalisés en deux phases clés. L’une consistait à s’assurer que le logiciel de test numérique était prêt à être utilisé de diverses manières (voir image 2 ci-dessous), et l’autre à faire en sorte que les concepteurs de tests respectent les principes directeurs susmentionnés (voir image 3 ci-dessous).

2.2.2.1 Première phase

Assurer l’assistance téchnologique adéquate. Extrait du webinaire FLIP+ sur les évaluations des élèves pour développer l’accessibilité des textes en France.

Comme on peut le voir sur l’illustration ci-dessus, ils ont tout d’abord veillé à ce que la plate-forme numérique utilisée pour l’évaluation électronique puisse intégrer les différents types d’assistance technologique (claviers spéciaux pour les personnes souffrant de handicaps physiques, visuels ou cognitifs, synthétiseurs vocaux pour les personnes souffrant de handicaps vocaux, etc).

2.2.2.2 Deuxième phase

Assurer l’adaptation des tests. Extrait du webinaire FLIP+ sur les évaluations des élèves pour développer l’accessibilité des textes en France

Ensuite, la deuxième phase de mise en œuvre s’est concentrée sur la conception des tests et a veillé à ce qu’ils soient beaucoup plus inclusifs : la formulation des questions a été simplifiée, la langue des signes a été intégrée dans les supports audiovisuels (et ont également été sous-titrés), les questions ont été bien contrastées, des textes descriptifs ont été rédigés pour offrir une alternative aux images, etc.

2.2.3 Une approche reproductible pour tous ?

Il est évident que tous les pays ne peuvent pas copier cette approche. Il faut que l’infrastructure technologique nécessaire soit déjà en place dans les écoles. que de nombreuses formations soient dispensées aux concepteurs de tests et aux enseignants pour la création de tests inclusifs. et qu’il y ait un va-et-vient dynamique entre les écoles et le gouvernement, parmi de nombreux autres défis.

[1] La communauté d’e-évaluation FLIP+ a été officiellement lancée en tant qu’association à but non lucratif en juin 2019. Elle s’est développée à partir de premières conversations remontant à janvier 2017 entre les organismes officiels d’évaluation de l’éducation de quatre pays (France-Luxembourg-Italie-Portugal : d’où l’acronyme) qui cherchaient des solutions à des défis communs en matière d’évaluation électronique. Pour plus d’informations, veuillez consulter leur site web : https://flip-plus.org/about.

[1] Pour en savoir plus sur d’autres domaines, comme l’accueil et l’intégration des élèves dans l’environnement scolaire, vous trouverez une mine d’informations sous le lien de l’ONISEP.

[1] La diversité c’est un atout ; elle correspond à des identités multiples. Aujourd’hui, nos identités à tous sont multiples ; et on ne peut pas les résumer à une seule partie de nous-même. Pour l’indifférence aux différences, la diversité un atout pour la France. Pascal BONIFACE, IRIS , 2009.

[1] Troubles du neurodéveloppement – Repérage et orientation des enfants à risque. Haute Autorité de Santé, 2020.

[1] Rapport mondial sur le handicap, OMS, BM, 2012